Les signataires s’associent à l’inquiétude et à la résistance des habitants, habituées, commerçantes et forains du quartier de la Plaine face au projet municipal de « requalification » de la place Jean-Jaurès (la Plaine, pour les Marseillais). Signez sur change.org
Une fois n’est pas coutume, Primitivi relaie la pétition "Touchez pas à la Plaine" à signer sur change.org ici :
La Plaine est un quartier qui boulègue, connu dans tout Marseille et au-delà. On y vient pour l’ambiance de ses cafés, sa convivialité, ses bancs, ses jeux de minots, ses parties de ballon, sa vie nocturne et, trois fois par semaine, son marché d’aubaines qui brasse les cultures locales.
Par mépris ou par calcul, les services municipaux ont depuis longtemps laissé ces lieux à l’abandon : éclairage public défaillant, trottoirs cabossés, jeux d’enfants cassés, fontaine asséchée, sacs plastiques flottant aux branches des tilleuls…
Pareil oubli vise à stigmatiser et à diviser. La saleté ? La faute aux forains et aux incivilités ! L’insécurité ? La faute aux jeunes et aux « usages déviants » ! Facile ensuite pour la Soleam, société publique d’aménagement urbain, de se présenter en sauveur avec un projet à 13 millions d’euros – projet dont le quartier n’a eu vent qu’à l’été 2015 grâce à une « fuite » de plans se proposant de rogner la moitié du marché.
Alors, de quelle rénovation parle-t-on ? À Marseille, les exemples ne manquent pas pour se faire une idée. La rue de la République est devenue un décor en trompe-l’œil. Les poissonnières du Vieux-Port ont été changées en attraction touristique. La place de Lenche est privatisée par les terrasses de restaurants. Le parc Lévy et ses arbres centenaires, tout comme l’îlot Chanterelle, ratiboisés au bénéfice de promoteurs. Le Rouet ouvrier, rayé de la carte presque aussi radicalement que le quartier Saint-Jean en 1943…
Sur la Plaine, la mairie aimerait gommer l’histoire et le caractère populeux et rebelle du quartier. La preuve ? Le harcèlement auquel elle soumet ces temps-ci les forains, les bars, les épiceries, les lieux associatifs, le carnaval indépendant ou la sardinade des feignants du 1er-Mai... – hostilité qui en dit plus long sur ses intentions que le cahier des charges de la Soleam !
-* Voilà pourquoi nous sommes contre :
Un « chantier-Attila » qui, pendant au moins deux ans, asphyxierait le quartier, les commerces de proximité et surtout le marché.
Une réduction du marché et un écrémage antisocial de ses forains.
– la suppression de places de stationnement sans vraies alternatives.
-* … et nous sommes pour :
L’entretien de la place et l’installation d’équipements voulus par la population, en particulier pour les adolescents.
Une meilleure gestion des déchets du marché.
Le retrait des grilles du square – gênantes et inutiles – auxquelles on préfèrera une haie à hauteur d’enfants.
Un quartier qui reste ouvert, vivant et populaire – notamment avec le maintien du marché, sans le transformer en carte postale pour croisiéristes.
Cette pétition est une initiative de l’assemblée de la Plaine et sera envoyée à qui de droit : Soleam, équipes de paysagistes-architectes, mairie centrale, mairies de secteur, Marseille-Provence-Métropole, ministère de la Ville…
Et enfin, pour ceux qui veulent aller plus loin :
Lettre ouverte aux quatre équipes de paysagistes-architectes
désignées par la Soleam pour réaliser le réaménagement de La Plaine
Bonjour,
La Soleam vous a demandé d’apporter des réponses à son programme de réaménagement de la place Jean-Jaurès, à Marseille. Nous, habitant·e·s et habitué.e·s du quartier, questionnons avec force les orientations de la mairie pour cette « requalification ».
À la lecture des comptes-rendus de la « concertation publique » – durant laquelle La Plaine a su prendre la parole – comme du cahier des charges de la Soleam, force est de constater que nos voix n’ont pas été entendues. Nous déplorons que la mobilisation de notre quartier ait été ignorée.
Considérant que votre travail de conception ne peut en aucun cas se baser uniquement sur les « invariants » imposés par la Soleam, nous osons espérer qu’à vos yeux de paysagistes, nous, habitant·e·s et usager·ère·s du quartier, serons des invariants majeurs.
Les « contraintes » de la Soleam et les nôtres s’opposent sur plusieurs points fondamentaux. Dans ce contexte, trouver une « réponse » donnant entière satisfaction s’avère difficile. Face à ce dilemme, nous vous proposons donc un « pas de côté » à même de modifier la vision de votre tâche.
Dans ce but, nous vous encourageons à prendre contact les uns avec les autres de façon à ce que chaque équipe propose des réponses au concours de la Soleam qui prennent en compte des contraintes de bon sens, respectant notre quartier et son caractère populaire. Un consensus sur le respect de l’existant, ainsi que de la volonté clairement exprimée par la population, est plus que souhaitable. Nous pensons qu’une telle coordination est compatible avec l’éthique de votre métier.
Selon nous, une « réponse » valide devrait intégrer les trois invariants suivants :
1) Respect de la multiplicité des usages cohabitant sur la place. Nous demandons le maintien d’une grande place en commun où, depuis toujours, des pratiques différentes se conjuguent selon les jours de la semaine ou même les heures de la journée. Les terrasses de bars ne doivent pas empiéter sur les autres usages – les bancs, les terrains de jeux pour les enfants et les adolescents, le marché, mais aussi les animations spontanées.
2) Prise en compte de l’impact social du réaménagement. Vous n’êtes pas sans savoir que vos choix techniques auront une incidence forte sur la vie du quartier. Sa muséification conduirait à une augmentation spéculative des loyers. Nous réclamons le respect et la permanence des plus fragiles – forains, petits commerçants, locataires précaires, familles modestes… Le marché doit conserver sa surface actuelle et son caractère populaire. Le projet devrait prendre en compte toutes les générations et ne pas exclure les jeunes. Enfin, le chantier ne doit pas asphyxier le marché et les commerces de proximité par sa durée et son ampleur.
3) Des solutions réalistes concernant la circulation et le stationnement. Pas de suppression de places de stationnement en l’absence d’alternatives – développement des transports en commun, parkings de délestage en libre accès, etc. Pas de modification de la circulation sans un vrai plan de mobilité à l’échelle du centre-ville.
Vous l’aurez compris, cette lettre est une invitation à assumer votre part de responsabilité. La balle est en partie dans votre camp. De notre côté, nous continuerons à œuvrer pour une évolution positive de notre quartier, respectueuse de l’ensemble des habitant·e·s et usager·ère·s.
Ci-joints un exemplaire de notre journal, une revue de presse et un décryptage du plan de réaménagement de la Soleam.
Bonne lecture et bon courage pour les défis qui vous attendent.