Une enquête radiophonique sur les usages populaires du jardin Levat

Depuis plusieurs années, à la faveur de l’ouverture du Jardin Levat, les habitants du quartier de la Belle de Mai à Marseille ont renoué un dialogue avec la terre, et sont venus y enraciner une part d’eux-mêmes. Ce documentaire sonore est une immersion dans l’intimité de ce jardin.

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Depuis plusieurs années, à la faveur de l’ouverture du Jardin Levat, les habitants du quartier de la Belle de Mai à Marseille ont renoué un dialogue avec la terre, et sont venus y enraciner une part d’eux-mêmes. Ce documentaire sonore est une immersion dans l’intimité de ce jardin.

L’histoire du jardin Levat commence il y a 150 ans avec la fondation du couvent des sœurs victimes du sacré cœur de Jésus. À l’époque, c’est un endroit champêtre situé à quelques encablures de Marseille. Les soeurs y trouvent la tranquillité nécessaire à une vie tournée vers la prière. Elles dressent un haut mur autour d’un espace agricole comprenant un verger, une prairie, un bois, des parcelles potagères. Dans l’espace circonscrit du couvent, le temps se fige tandis que dehors l’histoire accélère. Nous sommes à l’aube de la révolution industrielle. Marseille devient le premier port de l’empire colonial français. À quelques pas du convent, sur le plateau Saint-Charles, on bâtit une gare aux fins de transporter les matières premières venues des colonies orientales, des casernes pour sécuriser leurs chemins, des usines pour les transformer, et des maisons de fortunes pour les ouvriers. La Belle de Mai devient un quartier de Marseille, et sa population décuple. Un siècle et demi de bruits et fureurs dont les sœurs n’entendront jamais que les lointains échos entièrement dévouées à prier et à prendre soin du jardin qui les nourrit. En 2017, les sœurs quittent Marseille pour la Vendée. À leur départ, elles laissent, le témoignage d’un monde révolu au cœur d’un autre monde, lui aussi révolu. La fièvre industrielle qui a donné le visage que l’on connaît au quartier de la Belle de Mai est derrière nous. Les usines ont fermé. La plus grande d’entre elles a été transformée en friche culturelle. Aussi c’est sûrement par contraste que cette parcelle de terre rescapée de la révolution industrielle fascine. Fragment d’un paradis perdu. Preuve tangible que la terre ici a bien existé. L’un des jardiniers nous le dit : « le trésor ici, ce sont les mètres de profondeur de terre cultivable fruits de plusieurs centaines d’années d’agriculture qui n’ont pas été recouverts de béton. » Le trésor c’est le jardin. Mais les sœurs et leur solitude volontaire ne sont plus là pour le protéger. Désaffecté, cet espace singulier ne manque pas de se retrouver au milieu des enjeux liés à la transformation de la ville. En 2017, la mairie rachète le lieu et en cède la gestion à l’association Juxtapoz dont la raison sociale est d’empêcher l’occupation illégale de lieux vides en proposant de les transformer temporairement en résidences d’artistes. Cette décision est vécue comme profondément injuste par les habitants du quartier qui manquent cruellement d’espace pour respirer. Les associations se mobilisent et obtiennent de la Mairie que le jardin ouvre ses portes aux habitants qui vont tenter de lui inventer un devenir à la croisée de leurs besoins, et de ceux du jardin.

 
Bonne écoute !


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