CORONAVIRUS ET LE CREDIT D’IMPOT RECHERCHE

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Comment la politique de financement publique de la recherche portée par le CIR pour l’industrie met aujourd’hui le feu au poudre.

« Je suis Bruno Canard, directeur de recherche CNRS à Aix-Marseille. Mon équipe travaille sur les virus à ARN (acide ribonucléique), dont font partie les coronavirus ... C’est une recherche fondamentale patiemment validée, sur des programmes de long terme, qui peuvent éventuellement avoir des débouchés thérapeutiques.
Elle est aussi indépendante : c’est le meilleur vaccin contre un scandale Mediator-bis. .. Mais, en recherche virale, en Europe comme en France, la tendance est plutôt à mettre le paquet en cas d’épidémie et, ensuite, on oublie. Désormais, quand un virus émerge, on demande aux chercheur·ses de se mobiliser en urgence et de trouver une solution pour le lendemain.
Avec des collègues belges et hollandais·es, nous avions envoyé il y a cinq ans deux lettres d’intention à la Commission européenne pour dire qu’il fallait anticiper.
J’ai pensé aux 11 ans de CDD de Sophia, ingénieure de recherche, qui ne pouvait pas louer un appart sans CDI, ni faire un emprunt à la banque.

J’ai pensé au courage de Pedro, qui a démissionné de son poste CR1 au CNRS pour aller faire de l’agriculture bio.

Je me suis souvenu d’avoir mangé une pomme et un sandwich en dehors du congrès pendant que nos collègues de l’industrie pharmaceutique allaient au banquet.

J’ai pensé au Crédit Impôt Recherche, passé de 1.5 milliards à 6 milliards annuels (soit deux fois le budget du CNRS) sous la présidence Sarkozy.
J’ai pensé au Président Hollande, puis au Président Macron qui ont continué sciemment ce hold-up... »

Le 6 mars 2020, l’agence Nationale de la Recherche lançait un appel à projet doté de 3 millions d’euros : flash Covid 19. Partenariat publique privé avec Sanofi qui est sur les rangs pour le vaccin, avec le laboratoire BioMérieux, qui développe des tests de diagnostic, ABBVIE, qui a produit un traitement contre le SRAS, et Gilead, qui travaille sur un projet de traitement. L’Inserm avec l’Institut Pasteur, le CNRS et l’IRD sont en appui avec quelle suite et contrat pour les éventuels bénéfices économiques ?
Et bien, la passion et l`amour du métier, oui bien sur .

Le laboratoire d’Etienne Decroly, "Architecture et fonction des macromolécules biologiques", basé à Marseille, travaille sur le coronavirus depuis l’épidémie du Sras en 2003. "Mais la majorité des projets qu’on avait sur ce virus étaient en stand-by, en partie à cause de problèmes de financement", a-t-il regretté. "Une société moderne doit assumer le fait qu’on cherche dans différentes directions, sans savoir pour autant, au préalable, quelles vont être et d’où vont venir les avancées majeures", a souligné Etienne Decroly.

Le crédit d’impôt en faveur de la recherche (CIR) est, en France, une réduction d’impôt calculée sur la base des dépenses de R&D1 engagées par les entreprises. Il est déductible de l’impôt sur le revenu ou sur les sociétés dû par les entreprises au titre de l’année où les dépenses ont été engagées.

Cette aide fiscale destinée à soutenir et encourager les entreprises dans leur effort de recherche et développement a été créé en 1983 par la loi de finance.
Le crédit d’impôt recherche, ou CIR, devait être un dispositif provisoire d’incitation au renforcement des investissements en matière de recherche et développement pour les entreprises françaises.

Réformé profondément de 2004 à 2008, le Credit d`impot recherche est devenu la dépense fiscale rattachée à la recherche la plus importante en termes quantitatifs. Depuis la réforme de 2004 qui a introduit une part en volume dans le calcul de ce crédit d’impôt, le nombre d’entreprises déclarantes et le montant de la créance ont très fortement augmenté.

Entre 2008 et 2015, le nombre d’entreprises déclarantes a augmenté de 61 %, pour atteindre plus de 22 500 entreprises, pour un montant de dépenses éligibles de 21,8 milliards d’euros et un crédit d’impôt de 6,1 milliards d’euros en 2015, contre 1,7 milliard d’euros en 2007.

le CIR représenterait l’un des systèmes les plus généreux en Europe.

L’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) a rendu publique en avril 2017 un rapport sur la difficulté de disposer d’une évaluation précise de l’impact et de l’efficacité du CIR. En effet, l’identification des dépenses qui n’auraient pas été réalisées sans le CIR pose divers problèmes d’ordre méthodologique et demeure donc relativement hasardeuse.
Mais les institutions publiques dont le Senat nous assure que bien que pouvant être améliore ce crédit d`impôt recherche stabilise le niveau de recherche privée.
Tres bien...
Tres bien pour les emplois puisque bon nombre de chercheur-ses se sont vu offrir des postes en plus grands nombre,
mais dans quel but ? et au détriment de qui ?
Explications par les protagonistes,
Laurent Molinié, directeur chez Strategy&, et responsable je cite, « des performances de R&D dans les domaines du paiement », déclare :
« D’autres facteurs comme la stratégie, la culture, la connaissance et la mobilisation du management tout au long du cycle d’innovation permettent la supériorité de certaines entreprises ». L’important, selon lui, est « la façon dont les entreprises investissent en R&D, la qualité de leurs talents et les choix qu’elles effectuent afin de créer des produits et services qui répondent aux besoins implicites de leurs clients ».
Donc nous y voila, trois quart du budget de la recherche publique a destination des entreprises pour CREER DES PRODUITS ET SERVICES QUI REPONDENT A NOS BESOINS IMPLICITES ...
Implicites donc qui n`est pas clairement exprimé ? donc peut être ne sont-ils pas clairement indispensable ?

Bref voyons les scores ,
Avec un montant d’investissement en R&D estimé à 6,57 milliards de dollars en 2018, le leader tricolore de la santé Sanofi intègre le classement des 20 plus gros investisseurs mondiaux en R&D. Sanofi est le premier investisseur privé en R&D en France, peut-on lire sur son site Internet. Depuis plusieurs années, l’entreprise biopharmaceutique mondiale spécialisée dans les vaccins prend aussi une part active dans l`emergence d`un écosystème français de la e-santé, en travaillant en partenariat avec de nouveaux acteurs comme les start-up et les entreprises du numérique.
Notons que plusieurs entreprises sont critiquées pour supprimer des emplois dans la recherche après avoir bénéficié du CIR.

C’est le cas notamment de Sanofi, qui bénéficiant du CIR, a supprimé environ 2 000 emplois dans la recherche et développement en France ces dernières années.
Ou encore, Intel, qui annonce en 2016 supprimer 80 % de ses effectifs de recherche et développement en France, soit 750 emplois,
bien qu’ayant reçu 8 millions d’euros de CIR l’année précédente, tout en maintenant ses activités de recherche en Allemagne.
La société Thales enfin, du fait de la haute technicité liée à ses domaines d’activité (aérospatiale, défense), le groupe d’électronique est l’un des grands bénéficiaires du crédit impôt recherche. Depuis 2008, l’entreprise a perçu entre 110 et 165 millions d’euros chaque année à ce titre. Pour 2013, son montant s’élève à 130 millions. Mais, voilà, «  la manne du CIR n’a pas été utilisée pour développer la R&D, dénonce la CGT. Entre 2008 et 2013, la R&D autofinancée du groupe n’a pas réellement progressé, elle plafonne autour de 5 % du chiffre d’affaires (740 millions).  » D’après le syndicat, la recherche, la mise au point de prototypes et les développements sont de plus en plus externalisés. En même temps, les effectifs ont continué de décroître.

Dans une lettre au président de la République, intitulée « Urgence pour l’emploi scientifique », et datée du 13 octobre 2014, 660 directeurs de laboratoires du CNRS, de l’INSERM, l’INRA, l’INRIA, IRSTEA, IRD et du CEA demandent
une « réforme du Crédit Impôt Recherche (CIR) » qui permettrait
« d’éviter les nombreux détournements et l’optimisation fiscale dont il fait l’objet, lesquels sont dénoncés par la Cour des comptes et les parlementaires eux-mêmes. » Ils affirment dans cette lettre « À titre d’exemple la création
de 3 000 postes représente une somme de 180 millions d’euros soit 3 % du CIR qui s’élève à plus de 6 000 millions d’euros ! ».
Les directeurs signataires de cette lettre, au nombre de 840 au 12 novembre 2014, demandent de « mettre en œuvre un plan d’urgence pluriannuel et exceptionnel de recrutement et le financer par une réforme du CIR », réforme qui « permettrait de récupérer plus d’un milliard d’euros qui ne participent en aucune manière à un véritable effort de recherche et développement des entreprises, comme l’indique le Rapport de la mission d’évaluation et de contrôle sur le CIR de l’Assemblée nationale publié en juin 2010. »

Le Conseil national des universités, section 25, affirme que « moins de 2 % du crédit d’impôt recherche suffirait à boucler le budget des universités. C’est donc par choix politique que l’argent de la recherche est donné au privé »

Le Crédit d’impôt recherche est-il si sulfureux ? Au point qu’il faille organiser l’omerta sur un rapport d’enquête parlementaire à son sujet ? C’est ce que laisse penser la décision des sénateurs de droite (LR et UDI) ainsi que du Parti Socialiste d’empêcher en 2015 la publication du rapport de la sénatrice communiste Brigitte Gonthier-Maurin rédigé pendant 6 mois dans le cadre de la commission d’enquête parlementaire diligentée sur ce sujet.

la rapporteure Brigitte Gonthier-Maurin « bénéficiait des pouvoirs d’investigation du président de la commission des finances », le questionnaire détaillé aux entreprises du CAC 40 sur les conditions dans lesquelles elles bénéficient du CIR etait un Questionnaire auquel elle ne pouvaient légalement se soustraire. Tout ce travail, présenté par un rapport de 264 pages, est donc jeté aux oubliettes.

Le débat public, ainsi que les travaux de l’Assemblée nationale et du Sénat, auraient pourtant été éclairés par ces informations. Qui ne pourrait être curieux de savoir quelles sont les entreprises du CAC 40 qui, grâce au CIR échappent totalement à l’impôt sur les bénéfices des sociétés ? De savoir comment la Société Générale, une banque, ou le grand distributeur Carrefour, ont pu bénéficier à plein de ce dispositif fiscal si avantageux ? Ou par quel système Renault peut justifier de toucher du CIR pour l’activité de recherche d’une filiale sans effectifs ? Mais, le citoyen comme l’élu sera privé de ces informations car la sénatrice communiste est désormais soumise au « secret fiscal », sous peine de poursuites pénales, pour ces informations récupérées dans le cadre de cette commission d’enquête.
Selon la rumeur des couloirs parlementaires, des pressions politiques, et d’autres venues de l’industrie et notamment du patron de Renault Carlos Ghosn en direction du Président du Sénat Gérard Larcher, se soient transformées en consignes de vote, condamnant le rapport à la destruction. Carlos qui ? Ah oui, encore l`amour du métier et ah oui le développement de DES PRODUITS ET SERVICES QUI REPONDENT A NOS BESOINS IMPLICITES.

Nous ne demanderons pas pourquoi Sanofi, Thales, Intel alors que mise en cause continuent de toucher largement le Credit d`impot recherche.
Nous ne demanderons pas dans quelles mesures les budgets publiques peuvent ils exiger le partage des résultats en recherche fondamentale et appliquée ...
Nous ne nous etonnerons pas que le seul rempart est la multiplication de contrôles réguliers de la part de l’administration fiscale. Or a ce jour, le fisc n’est en capacité de contrôler, faute de moyens humains et financiers suffisant, que 4% du total des entreprises bénéficiant du CIR.
Rappelons le soulèvement des chercheurs-ses
a Paris le 12 decembre 2019, lors d`une réunion de l’Agence nationale de la recherche (ANR) avec la ministre de l’enseignement supérieur Frédérique Vidal.
au sein de l`emblematique l’incubateur de start-up Station F de Xavier Niel.
Xavier, qui ? Ah oui , toujours cet amour du metier et de l`interet general pour le developpement de besoins implicites ... les leurs visiblement ...

mix Articles multi source - https://fr.wikipedia.org/wiki/Cr%C3%A9dit_d%27imp%C3%B4t_recherche - https://academia.hypotheses.org/20902 - https://www.lemoci.com/actualites/entreprises-secteurs/innovation-investissement-les-depenses-en-rd-des-entreprises-dans-le-monde-augmentent-selon-pwc/ - http://www.sauvonsluniversite.com/spip.php?article8675 - http://sciences.blogs.liberation.fr/2015/06/11/omerta-pour-le-rapport-sur-le-cir-/ - https://www.lemonde.fr/blog/huet/2016/12/13/bilan-hollande-le-scandale-du-credit-dimpot-recherche/- https://www.humanite.fr/les-milliards-envoles-du-credit-impot-recherche-571624 - http://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/amendements/1255C/AN/2029 - http://www.assemblee-nationale.fr/15/cri/2018-2019/20190065.asp

Voir en ligne : chiffre du Senat

P.-S.
Nous appelons Bruno Canard a lancer une pétition afin de rendre publique le rapport de Brigitte Gonthier-Maurin de 2015,
demander en outre un audit actualisé afin d`établir un contexte légal, contraignant les entreprises a rendre public chaque année
leur dépense dans ce cadre et leur engagements en terme de maintient des effectifs de chercheurs.