Dans le cimetière de La Macarena, à 200 km de Bogota, ont été enterrés des milliers de corps, déposés là anonymement par l’armée à partir de 2005. Cette découverte ahurissante ainsi que les enquêtes ouvertes par la justice colombienne montrent que l’État est impliqué au travers de l’armée, de la police et des paramilitaires.
Un millier de fosses communes pourraient être trouvées sur le tout le territoire, suivant l’ONU les évaluations des magistrats instruisant les affaires "Justice et Paix" parlent d’environ 50 000 disparus depuis 2005, donc lors du premier mandat présidentiel d’Álvaro Uribe [5].
Mais certains de ces magistrats estiment déjà que le gouvernement va faire obstruction aux enquêtes, il est vrai que les présidentielles colombiennes approchent et que Uribe brigue un troisième mandat successif. Il a fait modifier la Constitution dans ce sens en septembre 2009 [6].
et pour viabiliser le pillage multinational - Photo : kaosenlared
Une fosse commune contenant 2000 cadavres a été découverte en Colombie
Dans le petit village de La Macarena, région de la Meta, à 200 km au sud de Bogotá, l’une des zones les plus chaudes du conflit colombien, a été découverte la plus grande fosse commune de l’histoire contemporaine latino-américiane, il pourrait y avoir jusqu’à 2000 personnes enterrées là, selon diverses sources et les témoignages des habitants. Dès 2005 l’armée, dont les forces d’élite sont déployées dans les environs, a déposé derrière le cimetière local des centaines de cadavres avec l’ordre de les inhumer anonymement.
Il s’agit du plus grand enterrement de victimes d’un conflit que l’on connaisse sur le continent américain. Il faut aller jusqu’à l’Holocauste nazi ou à la barbarie de Pol Pot au Cambodge, pour trouver quelque chose de similaire.
Il y a quelque semaines, le juriste Jairo Ramírez, secrétaire du Comité Permanent pour la Défense des Droits de l’Homme en Colombie, a accompagné une délégation de parlementaires anglais sur les lieux. Au moment on l’on était entrain de découvrir la dimension de la fosse de La Macarena. "Ce que nous avons vu était terrifiant", a-t-il déclaré à Public. "Une infinité de corps, et sur la surface des centaines de plaques de bois de couleur blanche avec l’inscription "NN" [7] et portant des dates allant de 2005 jusqu’à maintenant".
Ramírez ajoute : "Le commandant de l’Armée nous a dit qu’ils étaient des guérilleros tués au combat, mais les gens de la région nous parlent d’une multitude de leaders sociaux, paysans et des défenseurs communautaires qui ont disparu sans laisser de trace".
Tandis que le Ministère Public annonce des investigations "à partir de mars", après les élections législatives et présidentielles, une délégation parlementaire espagnole composée de Jordi Pedret (parti socialiste espagnol), Inés Sabanés (IU), Francesc Canet (ERC), Joan-Josep Nuet (IC-EU), Carles Campuzano (CiU), Mikel Basabe (Aralar) et Marian Suárez (Eivissa pel Canví) est arrivée hier en Colombie pour étudier cette affaire et pour faire un rapport pour le Congrès et le Parlement européen. La situation des femmes en tant que premières victimes du conflit et de celle des syndicalistes (juste en 2009 41 d’entre eux ont été assassinés) seront également leurs axes de travail dans différentes zones du pays.
Plus de mille fosses communes dans le pays
L’horreur du village de La Macarena a mis à jour l’existence de plus de 1000 fosses communes contenant des cadavres non identifiés en Colombie. A la fin de l’année dernière, les médecins légistes avaient recensé environ 2500 cadavres, ils avaient réussi à en identifier près de 600, dont ils ont pu remettre les corps aux parents.
La localisation de ces cimetières clandestins a été possible grâce aux déclarations de sous-officiers paramilitaires, présumés démobilisés, qui bénéficient de la discutable loi "Justice et Paix". Laquelle leur garantit une peine symbolique en échange de la confession de leurs crimes.
La dernière de ces déclarations a été celle de John Jairo Rentería, alias Bitume, qui vient de révéler devant le procureur, et les parents des victimes, que lui et ses acolytes ont enterré "au moins 800 personnes" dans la propriété la Villa Sandra, à Puerto Asís, région du Putumayo. "Il fallait démembrer les gens. Tous dans les Auto-défenses [8] avaient à apprendre cela et il a été souvent fait sur des gens vivants" [9], a avoué le chef paramilitaire au procureur de la république.
"Le Gouvernement ne veut pas faire d’enquête"
L’interview d’Alfredo Molano [10], l’un des chroniqueurs les plus influents de la Colombie, a parcouru le pays comme chroniqueur de la violence, ce qui lui a valu de devoir s’exiler pour échapper aux menaces des militaires et des paramilitaires.
Quelle est la situation des fosses communes en Colombie ?
Le Parquet Général de la Nation parle lui-même de 25 000 "disparus", qui doivent être quelque part. Il y a des cimetières clandestins énormes en Colombie. Il y a des gens que l’on a effacé. Il est aussi possible qu’ils aient fait disparaître beaucoup de restes comme cela se passait dans les fours crématoires au temps du nazisme [11].
Ces fosses ont-elles à voir avec ce qu’on appelle les “faux positifs” ?
Oui, tout cela peut être en relation avec les “faux positifs” [12]. L’armée les enterrait clandestinement. Une grande partie d’entre-eux vont être retrouvé dans ces fosses communes.
Quelle peut-être l’ampleur de ces découverte de fosses ?
C’est terrible. Même dans les années cinquante il y a pas eu autant de brutalité en Colombie que ce que montrent ces actions des paramilitaires, mais le Gouvernement n’a pas la volonté d’enquêter à fond, et il ne permettra qu’on ne trouve seulement que quelques tombes. De plus, les zones à fouiller sont très grandes et les difficultés techniques pour les identifications, épreuves chimiques et et tests ADN, sont énormes.
Vidéo : Ce que le Terrorisme de l’État fait en Colombie : le paramilitarisme est une stratégie d’État.
Le monde doit connaître le génocide que le Terrorisme d’État est entrain perpétrer en Colombie, au travers des militaires et des paramilitaires qui sont son instrument de l’horreur. Il est urgent de dénoncer le criminel : l’État.
Il faut que nous réussissons à unir les efforts de nombreuses personnes à travers le monde, pour dénoncer le crime l’État colombien. C’est urgent, le peuple colombien en appelle à la solidarité, face à la monstruosité de l’État.
L’État colombien a fait disparaître plus de 50 000 personnes [13] en utilisant ses outils de répressions régaliens (policiers, militaires), et de son outil caché : sa stratégie paramilitaire.
Les massacres ont été utilisés par l’État pour paralyser la revendication sociale, et pour obtenir le déplacement massif de populations : c’est de cette manière qu’il a réussi à déplacer plus de 4 millions de personnes. Les terres sont ainsi vidées de leurs habitants pour être livrées à la cupidité des multinationales et des propriétaires terriens, qui sont avec l’État, les co-financieurs du paramilitarisme.
Le plus terrible c’est que le phénomène paramilitaire et le Terrorisme d’État ne sont pas des choses du passé : ils continuent aujourd’hui.
L’État colombien et les multinationales savent que c’est la seule manière de perpétuer la situation d’injustice sociale qui existe en Colombie … c’est pourquoi ils utilisent la Terreur Étatique-Paramilitaire : parce que cela favorise leurs intérêts.
Aussi c’est pourquoi, les multinationales et l’oligarchie régionale sont disposées à employer l’horreur paramilitaire contre tout processus d’émancipation sociale : déjà nous avons pu voir que le paramilitarisme est planifié contre l’émancipation en Venezuela [14].
La région andino-amazonienne est une région clef pour les cupides [15]. A cause de cela, et face au génocide étatique dont souffre le peuple colombien, nous devons étudier, connaître et lutter contre ces mécanismes de l’horreur, et contre l’État colombien génocidaire.
Face à cela, la solidarité internationale avec le peuple colombien est urgente.
L’ONU en Colombie - Émission de radio les Nations Unies des mains amies : "Recommandations contre le délit de la Disparition Forcée en Colombie". - (fichier mp3 joint)
“Je voudrais commencer par rappeler les mots que j’ai malheureusement entendu d’une mère Wuayúu qui avait perdu sa fille suite à une disparition forcée et qui a dit que la disparition forcée est une blessure qui saigne tous les jours...
Ils ont fait disparaître sa fille et après l’avoir cherchée pendant des mois et des semaines, dit-elle, ils l’ont mise comme NN : je l’ai retrouvée comme NN sans nom, ils ne voulaient pas me la laisser voir, ils l’avaient mise dans des sacs mais j’avais besoin de la voir, j’ai ouvert le sac et je l’ai vue, c’était elle, les mains brûlées, les seins mutiles, violée, horrible, mais on avait besoin de la voir, de savoir que c’était elle et de lui donner une sépulture selon nos coutumes. Mais ils n’ont pas même respecté ma douleur et même à la veillée des morts les coupables sont venus ; ils ont envoyé leurs femmes me porter un sac de yucca”, c’était Yanette Bautista, de la Fondation Nadya Erika Bautista pour les Droits de l’Homme.
La disparition forcée est un crime qui ne cesse pas d’être commis et qui se maintient dans le temps, parce que les parents ne savent pas ce qui est arrivé à la personne disparue.
Les années n’importent pas, et jusqu’à ce que la personne réapparaisse ou que l’on trouve ses restes, les familles restent dans l’incertitude et l’angoisse.
C’est pourquoi, la “Convention Internationale des Nations Unies pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées de l’année 2005”, reconnaît que les parents sont victimes, autant que les personnes disparues.
Ainsi l’explique Christian Salazar, Représentant en Colombie de la Haute Autorité des Nations Unies pour les Droits de l’homme, OACNUDH : “Quand une personne disparaît d’une famille, vous pouvez imaginer la douleur, la confusion, l’impact catastrophique dans le coeur de la maman, du papa, du frère, de tous les parents. En plus de l’impact psychologique il y a l’impact économique, souvent la personne qui a disparue est une personne qui soutenait le foyer grâce à son travail, c’est pourquoi on considère aujourd’hui que non seulement, dans le cas de la disparition forcée, la personne disparue est victime, mais également tous les parents parce que tous sont fortement affectés par cette violation des Droits de l’Homme”.
En Colombie, le délit de disparition forcée existe depuis plus de trente ans.
Cependant, le pays n’avait pas les chiffres du nombre de personnes disparues ni du nombre de parents de victimes, qui pouvait montrer l’ampleur de ce délit.
Maintenant il les a. Écoutons Christian Salazar d’OACNUDH : “Les dernières estimations provenant de l’unité Justice et Paix, disent que de manière réaliste il y a au moins 50.000 personnes disparues en Colombie, ce qui veut dire qu’au moins 200 000 personnes sont affectées par cette violation des Droits de l’Homme”.
Ce très grand nombre de victimes en Colombie, plus grand que celui des disparus en Argentine, exige la conception et l’exécution d’une politique publique contre la disparition forcée.
C’est pourquoi, la “Table inter-institutionnelle d’assistance psychosociale à des victimes de disparition forcée” a publié le document “Recommandations pour une politique publique avec un objectif psychosocial contre la Disparition Forcée” …
… Qui fait ressortir la nécessité d’un accompagnement psychosocial pour les parents des personnes disparues, durant l’enquête et la recherche.
Le texte fait plusieurs recommandations qui devraient être intégrées dans la politique publique contre la disparition forcée, elles sont destinées à toutes les personnes étaient en contact avec les victimes de ce crime, comme nous l’explique Christophe Beney du Comité International de la Croix-Rouge en Colombie : “Les recommandations sont destinées à toutes les personnes qui d’une manière ou d’une autre font les enquêtes, les recherches, mènent les poursuites et prennent une décision judiciaire sur cas de disparition forcée, aux organismes d’état, aux organisations de la société civile, et à la coopération internationale”.
Alors : quelles recommandations fait le Bureau de la Haute Autorité des Nations Unies pour les Droits de l’Homme, contre la disparition forcée en Colombie ?.
Son Représentant, Christian Salazar, indique : “La première est une recommandation d’ordre générale, que toutes les parties présentes dans le conflit armé de Colombie arrêtent cette pratique néfaste, et la deuxième recommandation en relation est que la Loi pour les victimes soit conforme à la déclaration des Nations Unies la protection de toutes les personnes contre la disparition forcée”.
Si vous voulez connaître le document “Recommandations pour une politique publique avec un objectif psychosocial contre la Disparition Forcée”, allez sur le site www.hchr.org.co et téléchargez-le gratuitement.
Source :
Prensa Rural "Aparece en Colombia una fosa común con 2.000 cadáveres"
Kaos en la red "VIDEO : Lo que el Terrorismo de Estado hace en Colombia : el paramilitarismo es Estrategia Estatal."
Radio ONU "Recomendaciones contra el delito de la Desaparición Forzada en Colombia"
Traduction : Primitivi
[1] Le mandat de 2002-2006, son actuel mandat est celui de 2006-2010
[2] Voir l’article de l’Express qui s’en étonne "Alvaro Uribe se rapproche d’un troisième mandat en Colombie"
[3] Le mandat de 2002-2006, son actuel mandat est celui de 2006-2010
[4] Voir l’article de l’Express qui s’en étonne "Alvaro Uribe se rapproche d’un troisième mandat en Colombie"
[5] Le mandat de 2002-2006, son actuel mandat est celui de 2006-2010
[6] Voir l’article de l’Express qui s’en étonne "Alvaro Uribe se rapproche d’un troisième mandat en Colombie"
[7] "Ningun Nombre" : aucun nom.
[8] Les AUC, Auto-défenses Unies de Colombie. Un des plus grands groupes paramilitaires en Colombie.
[9] Les paramilitaires repentis ont avoué avoir démembré leurs victimes à l’aide de tronçonneuses, et s’être également débarrassés de corps dans des fours crématoires. Voir "Quand le vice-président colombien, demandait un "Bloc paramilitaire""
[10] Alfredo Molano. Sociologue et écrivain
[12] Des civils colombiens assassinés et qui ont été officiellement présentés comme des guérilleros “morts au combat”
[13] Pour ce chiffre, voir la transcription de l’émission "Nations Unies des mains amies" de Radio ONU plus bas
[14] Comme le coup d’état déjoué en mai 2004 et aussi l’affaire dans laquelle la Communauté Autonome de Madrid s’est retrouvée liée aux paramilitaires
[15] Toute la région regorge de minéraux, métaux, pétrole, bois, etc. Autant de prétextes de destruction, lire ou relire également "Les veines ouvertes de l’Amérique Latine" d’E. Galeano