A travers la présentation par le Collectif 360° et même plus d’un travail en cours sur l’histoire du collectif Newsreel,
on échangera sur la pratique d’un cinéma de combat, engagé dans la luttes politiques.
Déjà quelques questions émergent :
Comment cette expérience cinématographique, d’il y a 40 ans aux États-Unis, peut être une source d’inspiration et d’engagement ici et aujourd’hui ?
- Prendre radicalement parti dans notre création artistique et la diffusion de nos opinions et de nos revendications
- Occuper le terrain des luttes pour inventer avec le peuple le récit populaire
- Se dégager des cadres rigides pour laisser l’imaginaire collectif s’émanciper
The Newsreel
Dans l’effervescence activiste de la fin des années 60, un groupe de cinéastes se réunit à New York suite à un appel du cinéaste Jonas Mekas et décida de réaliser collectivement des films pour attirer l’attention publique sur les revendications et les problèmes de leur temps, en particulier sur la guerre du Vietnam. Ils voyaient dans le cinéma une arme à mettre au service des mouvements et des luttes, une arme à haute exigence qualitative et artistique. Ils se baptisèrent The Newsreel.
De 1967 à 1971, de nombreuses cellules de ce collectif décentralisé se formèrent de Boston à San Francisco en passant par la Floride, dans le sillage de la grande tradition des cinéastes dissidents aux États-Unis comme la Film and Photo League des années 30. Une des particularités de ces collectifs était de ne pas séparer l’idéologie de la production, ni de la forme esthétique ou de la distribution. Des dizaines de films furent ainsi réalisés, aussi résolus et crus que les sujets dont ils traitaient. Des films de droits civils et de torts civiques, des films de soulèvements dans les communautés et de protestations sur les campus, des films sur la guerre du Vietnam et sur la guerre domestique contre celle-ci. Politiquement et formellement novateurs, ces films ont gardé leur force révolutionnaire et représentent une puissante gamme de propositions et d’approches d’un cinéma réactif et catalyseur.
Par principe, les films de Newsreel n’étaient pas signés par leurs auteurs et étaient libres de droits, même si aujourd’hui certains participants et fondateurs sont plus ou moins connus, comme Robert Kramer qui réalisa notamment au sein du collectif un film de fiction prônant la lutte armée « Ice ». Ce long-métrage divisa le groupe sur cette question et ne fut finalement pas distribué par Newsreel. Les séances des films étaient toujours accompagnées de débats (souvent très !) animés par les membres des collectifs. The Newsreel distribuait également des films en provenance de Cuba, du Vietnam, de l’Afrique et du Moyen-Orient et procédait aussi à des échanges avec leurs auteurs. Ceci était non seulement une manière de déhiérarchiser un mouvement vertical de propriété privée et de transformer ces films en devenir commun, mais aussi un processus horizontal de travail d’images à la Vertov : construire des films mouvants et adaptables selon les contextes sociaux et politiques. California Newsreel et Third World Newsreel (New York) continuent aujourd’hui de produire et de distribuer des films dans le même esprit.
PREMIÈRE DÉCLARATION des NEWSREEL 22 décembre 1967
Troublemakers, 1966, 53’ – Un groupe de citoyens blancs de Newark travaille avec la communauté noire : l’engagement et ses contradictions.
No Game, 1967, 17’ – En octobre 67, devant le Pentagone, 100 000 personnes manifestent contre la guerre au Vietnam.
Strike City, 1967, 30’ – L’un des premiers films Newsreel, sur les travailleurs d’une plantation du Mississipi.
Case Against Lincoln Center, 1968, 12’ – Sur l’expropriation de 20000 familles latino-américaines lors de la construction du Lincoln Center.
Columbia Revolt,1968, 50’ – Les étudiants en grève contre l’exploitation de la communauté noire de Harlem.
Garbage, 1968, 10’ – Une action spectaculaire du groupe Up Against the Wall Motherfuckers.
Mill-In, 1968, 12’ – Occupation des rues chics de New York la veille de Noël.
Off the Pig (Black Panther), 1968, 15’ – Témoignage sur les Black Panthers, entretiens avec Huey Newton et Elridge Cleaver.
Pig Power, 1968, 5’ – À New York et à Berkeley, la police était là pour « préserver le désordre ».
Summer 68, 1968, 60’ – Comment organiser la contre-information et la mobilisation autour de la guerre au Vietnam.
Up Against the Wall Ms. America, 1968, 8’ – Intervention durant l’élection de Miss America 1968.
Yippie, 1968, 15’ – Sur les émeutes lors de la Convention démocrate : ciné-tract farceur en réponse aux bavures policières.
Amerika, 1969, 30’ – Mouvements de protestation américains contre la guerre du Vietnam.
Bobby Seale, 1969, 15’ – Entretien avec Bobby Seale, leader des Black Panthers, alors emprisonné.
Community Control, 1969, 50’ – Sur le colonialisme intérieur en milieu urbain.
High School Rising, 1969, 15’ – Critique de l’enseignement secondaire et universitaire.
Make-Out, 1969, 12’ – Sketch à la Molly Bloom.
May Day Panther, 1969, 15’ – Kathleen Cleaver, Bobby Seale et d’autres Black Panthers revendiquent des droits pour l’Afrique.
People’s War, 1969, 40’ – Organisation du peuple vietnamien contre l’armée américaine.
Army, 1970, 30’ – L’impérialisme américain a besoin d’une puissance militaire considérable pour contrôler ses marchés à l’étranger.
Fuerra Yanki, 1970, 15’ – Sur le contrôle économique de la République dominicaine par les intérêts américains.
Lincoln Hospital, 1970, 12’ – Les travailleurs d’une clinique en faillite dans le South Bronx gèrent eux-mêmes l’institution.
Wilmington, 1970, 15’ – Sur la façon dont l’empire industriel DuPont contrôle l’État du Delaware.
My Country Occupied de Tami Gold et Heather Archibald, 1971, 30’ – Sur la déstabilisation du Guatemala par les États-Unis.
El Pueblo se Levanta (The Young Lords Film), 1971, 50’ – Sur les luttes politiques de la communauté porto-ricaine.
Only the Beginning, 1971, 20’ – Les G.I. eux-mêmes protestent contre la guerre.
The Earth Belongs to the People, 1971, 10’ – Essai pionnier sur les rapports entre écologie et capitalisme.
The Women’s Film, 1971, 40’ – Émergence du féminisme moderne, par un collectif de femmes de San Francisco.
Venceremos, 1971, 20’ – En 1970, 2 brigades formées par 500 Américains se rendirent à Cuba pour aider aux récoltes.
Inside Women Inside de Christine Choy et Cynthia Maurizio / Third World Newsreel, 1978, 28’ –Femmes en prison.
Inciting to Riot ,10’ – Appel hautement énergétique en faveur de la guerilla.
Make It Real, 8’ – Le contraire de « Just do it ».
Quelques films distribués par Newsreel
U.S. Techniques and Genocide in Vietnam de Vietnamese People’s Army Films, Vietnam, 1968, 35’ – Sur les armes inventées et utilisées par l’armée américaine contre les civils
Struggle for Life du National Liberation Front Vietnam, Vietnam, 1968, 30’ – Sur le travail des médecins vietnamiens pendant la guerre
Young Puppeteers of Vietnam (Democratic Republic of Vietnam) de Vietnamese People’s Army Films, Vietnam, 1969, 20’ – L’art comme nécessité vitale dans les zones libérées du Sud Vietnam.
Women of Telecommunications Station n°6 de Vietnamese People’s Army Films, Vietnam, 1969, 20’ – Rôle des femmes dans la résistance vietnamienne.
79 Printemps de Santiago Alvarez, Cuba, 1969, 25’ – Hommage du grand cinéaste cubain à Ho Chi Minh.