Cela fait un an qu’un coup d’État a eu lieu au Honduras. Les nouvelles étaient tout d’abord confuses pour qui ne connaissait pas l’histoire de ce petit pays. La plupart des journaux et des médias internationaux forçant le trait et dépeignant Manuel Zelaya comme un dictateur en puissance.
Mais quelques semaines après, grâce à l’organisation des honduriens, aux médias alternatifs et à toutes les informations circulant sur la toile la réalité des faits était connue : Zelaya était un président progressiste et on avait affaire à un putsch oligarque.
Mais depuis rien n’est rentré dans l’ordre, bien que la dissimulation du coup d’État ait échoué le gouvernement des États-Unis a continué son jeu machiavélique bientôt suivi par les gouvernements européens avides d’accords commerciaux, laissant avec ô combien d’aisance les droits de l’homme et l’équité de côté ils se sont précipités pour reconnaître Porfirio Lobo en tant que chef d’État légitime alors qu’il n’est qu’un pantin oligarque.
Mais, et heureusement pour eux, les honduriens ne lâchent pas l’affaire. Ce putsch est la goutte de trop pour nombre d’entre eux, et ils désirent plus ardemment encore mettre en place une société équitable. Les assassinats et les exactions n’y changeront rien, le peuple hondurien est en marche et il semble qu’il ne s’arrêtera pas en chemin même si les puissances de l’argent et du pouvoir s’ingénient à le semer d’embûches.
La détermination sans faille que montre actuellement la population hondurienne est un exemple de pugnacité que d’autres nations (plus occidentales) ferait bien de prendre en exemple.
le site voselsoberano propose deux galeries d’images sur la commémoration du coup d’État à San Pedro Sula, ainsi que quelques images des activité du comité indigène COPINH à La Esperanza, Intibucá : San Pedro Sula (jour), San Pedro Sula (nuit), La Esperanza (à la fin de l’article) -
Ce lundi 28 juin, cela fait un an qu’a eu lieu le coup d’État au Honduras qui a expulsé du pouvoir le président Manuel Zelaya. Ce même jour, le Front National de la Résistance Populaire (FNRP), le mouvement qui s’est organisé en réponse au putsch, fête également son premier anniversaire de lutte.
Le pays avance toujours lentement pour un retour à la normale au niveau politique, économique, sociale et démocratique. Des persécutions, des intimidations, des assassinats et diverses violations à l’encontre des droits de l’homme sont encore fréquemment enregistrés. Cela confirme que l’actuel président, Porfirio Lobo, n’a pas encore réussi, durant ses cinq mois de gouvernement, à remettre le pays vers la voie de la démocratie.
Dans ce contexte, de plus en plus de personnes ont trouvé dans les idéaux du Front de la Résistance un chemin pour une transformation positive du pays. Pour parler de cette lutte pour la refondation du Honduras, du chemin parcouru pour tenter d’implanter une Assemblée Constituante inclusive et populaire, et évaluer cette première année du Coup d’État, ADITAL a interviewé le FNRP.
Adital - Le sentiment populaire le plus caractéristique. Est-il possible d’affirmer que la population hondurienne est sûre que le pays a besoin d’une refondation ?
FNRP - L’histoire vécue actuellement par le Honduras est l’un de ses moments les plus agités. La vie du pays a été coupée en deux après l’apparition de la Résistance Populaire en réponse au Coup d’État du 28 juin 2009.
Le Front National de Résistance Populaire (FNRP) est la plate-forme dans laquelle tous les secteurs politiques et sociaux du Honduras ont approuvé à la majorité le fait d’être uni pour concevoir et construire une société juste, sans discriminations, où l’exploitation des uns par les autres ne trouve simplement pas sa place.
L’ultime finalité est la refondation de l’État, concept qui poursuit maintenant les classes oligarques patronales comme un cauchemar, elles qui ont cru qu’en sortant Manuel Zelaya de sa maison par les fusils et en envoyant au Costa Rica ils en finiraient avec un projet qui était déjà devenu un désir collectif.
L’autre lutte est le retour avec toutes les garanties citoyennes du président Manuel Zelaya, puisque l’exil forcé viole tous les droits qu’il a en tant que citoyen hondurien.
Adital - Le Front de Résistance est né un peu après le putsch, il approche également de son premier anniversaire. Quelle est l’évaluation qui peut être faite des actions du mouvement durant tout ce temps ? Et ensuite, est-ce que les stratégies vont être les mêmes ou est-il temps d’en changer ?
FNRP - La Résistance est également née le 28 juin, quand les organisations Populaires et le peuple en général sont sortis massivement dans la rue pour condamner le coup d’État et pour exiger le retour à l’ordre Constitutionnel.
La Résistance s’organise avec la marche, avec une volonté de lutte et de courage qui surpasse tout clivage social, puisque nous représentons tous les secteurs sans regarder l’idéologie et le parti politique auquel il appartient, en dépassant la peur d’être tué par la répression mise en place par la dictature.
Au Honduras depuis le 28 juin dernier rien n’est plus le même, dans tout le pays il y a une Résistance, les gens s’organisent dans les quartiers, dans les colonies, dans les communautés, dans les départements.
Cette décision du peuple de s’organiser et de continuer la lutte nous a permis de construire les piliers sur lesquels repose l’ardent désir de mettre en place une société nouvelle.
D’autre part la Résistance est devenue plus forte elle est passée de l’action conjoncturelle à la structuration et à la stratégie pour prendre le pouvoir et pour changer le pays. Même les secteurs les plus réactionnaires de la droite anachronique hondurienne le reconnaissent et considèrent le surgissement d’un nouveau Pouvoir Populaire, créé et conduit par le FNRP, comme un danger imminent.
Actuellement notre travail est de réussir à récolter plus d’un million de signatures dans la "Déclaration Souveraine" où en tant que peuple hondurien nous nous convoquons à une Assemblée Nationale Constituante, et de cette manière chercher les mécanismes pour sa mise en place.
Adital - La Carta Magna du Honduras a été élaboré en 1982, durant une période de dictature et sans consultation populaire. Avec la convocation à une Assemblée Constituante : qu’est-ce qui serait le plus important à modifier dans la Constitution du pays ?
FNRP - Au début des années 80, l’Amérique centrale vivait des moments très significatifs de la lutte parmi lesquels on distingue le triomphe du Front Sandiniste au Nicaragua et la guerre insurrectionnelle du Farabundo Martí au Salvador, les organisations indigènes au Guatemala et l’avance du Mouvement Populaire au Honduras.
L’empire des États-Unis avait besoin de sauver le Honduras puisque les gouvernements militaires étaient paralysés, il fallait lui donner un "Ordre Constitutionnel" et ils ont recouru aux élections, ils ont installé une Assemblée Nationale Constituante, qui a élaboré une nouvelle Constitution pour qu’elle défende institutionnellement les intérêts géopolitiques de l’empire, dans le cadre du conflit en Amérique centrale.
La Constitution du Honduras a été approuvée en Janvier 1982, sur trois axes fondamentaux choisis par les hommes politiques et les entrepreneurs : Vendre le Honduras, en argumentant qui était la seule manière de sortir le pays du sous-développement, réduire l’État à sa plus simple expression, pour que l’État soit un centre de corruption et de déficit fiscal, et établir les Forces Armées comme garant de cette Constitution.
Avec la Constitution de 82 ce qui a été obtenu ce fut de donner le pouvoir aux grands entrepreneurs et de réduire le pouvoir de l’État et du peuple, en empêchant les réformes.
Le nouveau cadre légal [que le FNRP souhaite mettre en place] aura pour objectif central les intérêts populaires, au Honduras on ne légiférera plus jamais pour les entrepreneurs et l’État de Droits existera pour le développement de l’être humain et pas celui des entreprises qui ont survécu grâce au pillage du trésor public et à l’exploitation des ressources et des personnes.
Il sera participatif car on ne l’entend pas comme un petit groupe au pouvoir décidant en passant outre les majorités, mais comme des majorités exerçant le pouvoir à travers des structures communautaires de participation politico-sociale.
Jusqu’à présent ce processus a été la clé du succès de la Résistance Populaire, puisqu’il n’y a pas un coin du pays qui n’a été pris en considération et les problèmes des communautés ont été défendus par les communautés elles-mêmes. Cela fait aussi partie de ce processus, différents programmes qui enrichissent le spectre politique et social du pays.
On prend en considération les nécessités des populations indigènes et des descendants africains, les luttes ouvrières comme les luttes paysannes, la voix des étudiants retentit aussi fort que les exigences des environnementalistes et les communautés gay, lesbiens, travestis, bisexuels et transsexuels (LGTTB) exigent leurs droits à la même table où les communautés chrétiennes et religieuses invitent lutter pour la justice.
Les femmes ont été en tête de la lutte dans la rue et aujourd’hui elles assument leur position d’égalité aux côtés des hommes pour faire avancer le processus, qui sans le dire, montre à chaque pas qu’il dispose de la force qui a rendu possibles toutes les révolutions impossibles.
La Nouvelle Constitution est construite quotidiennement, mais ce n’est pas le but ultime des honduriens et des honduriennes. La Constitution n’est que le cadre légal qui rendra possible la construction d’une nouvelle société.
Adital - quels sont les résultats que le FNRP attend des mobilisations pour le premier anniversaire du Coup militaire ?
FNRP - Les mobilisations ont eu lieu depuis le 28 juin et cela continue d’être une démonstration du peuple hondurien en tant qu’acte de désobéissance et de résistance contre une dictature imposée au pays.
Cette démonstration de force et de mécontentement d’un peuple préoccupe les putschistes, l’empire et l’oligarchie, car leur stratégie est de diviser, de soumettre la Résistance et d’éviter son développement national.
Ce 28 juin nous ferons également un hommage à la mémoire de toutes les personnes victimes de la répression cruelle planifiée par les forces répressives de l’État conjuré (Michelleti-Lobo). Nous sommes et nous continuerons d’avancer pour cultiver une mémoire collective forte qu’ils ne pourront pas arrêter avec le pouvoir médiatique de l’oligarchie politico-patronale.
Adital - La Résistance attend-elle encore une aide de la part des organismes internationaux pour revenir à une normalité démocratique ? Après le putsch, le comportement de ces organisations a-t-il été à un quelconque moment important et bénéfique pour le pays ?
FNRP - A un certain moment la position adoptée par les organismes internationaux et les gouvernements a été important pour freiner l’avance de la dictature.
Puis peu après ils ont commencé à promouvoir la signature de les accords de San José proposé par le gouvernement des États-Unis, avec le président [Oscar] Arias du Costa Rive comme médiateur. Accords qui n’ont par pris les intérêts du peuple hondurien en considération, pour lesquels la Résistance n’était pas d’accord et que le président Zelaya a considéré comme un échec.
Les dictatures ne se mettent pas en place pour repartir si rapidement mais au contraire elles sont mises en place pour rester, c’est pourquoi la Résistance n’a été d’accord avec aucune de ces approches qui se sont déroulées dans un cadre de forte violation des Droits de l’homme de tous ceux et celles qui étaient contre le Coup d’État, et d’un autre côté tout cela s’est négocié dans une totale inégalité de conditions quand le président Zelaya s’est trouvé "pris" dans l’ambassade du Brésil.
Maintenant on veut nous imposer un gouvernement de la vérité et de la réconciliation, résultat d’un processus électoral illégal faisant suite au coup, appuyé par les organismes putschistes et avec la bénédiction du gouvernement gringo.
Dans le Front National de Résistance Populaire il est clair que la démocratie sous la protection du néolibéralisme n’a été qu’un mirage où ont émergé des inégalités sociales très dures, où plus de 70% de la population vit sous le seuil de pauvreté. C’est pourquoi nous travaillons pour construire un État d’égalités qui soient réellement démocratiques, nous voulons transformer structurellement notre pays avec des mécanismes qui évitent le monopole politique que maintiennent actuellement les deux partis traditionnels (libéral et nationaliste) et arrêter l’injustice qu’organise les 10 familles qui croient que le Honduras leur appartient.
interview réalisé par Natasha Pitts journaliste à Adital (Brésil)
Source : Adital "Demostración de fuerza y descontento del pueblo preocupa a los golpistas"
Traduction : Primitivi